+33 (0)4 42 70 07 03

Retour à la liste

PINT Avocats Newsletter Novembre 2021 - Marques : dépôt en Chine

 

Newsletter PINT Avocats

Novembre 2021

Ce mois-ci, on a invité NextMarq à nous parler de marques et des subtilités d’un dépôt en Chine. On vous parle aussi logiciel et décompilation (), RGPD et journalisation (par ici). Bonne lecture !

            Adapter sa stratégie de protection de marque au marché Chinois

 

Tout d’abord, il convient de souligner que la Chine avec plus de 1,4 milliard d'habitants, représente près d’1/6ème de la population mondiale, mais que la très grande majorité de ses ressortissants ne sait ni lire, ni même comprendre les lettres et termes de l’alphabet latin.

Préalablement à votre entrée sur le marché chinois et afin de promouvoir les ventes de vos produits et/ou services sur ce territoire, il est recommandé de faire traduire, translittérer ou adapter vos marques latines en caractères chinois.

  • Intérêt commercial et publicitaire

Toutes les marques mondialement connues ont des équivalents en langue chinoise, lesquelles sont enregistrées et exploitées en Chine, comme Coca Cola 可口可乐, Pepsi 百事, McDonald’s 麦当劳, Microsoft 微软, Apple 苹果, Starbucks 星巴克, Google 谷歌, Facebook 脸书, Chanel 香奈儿, Dior 迪奥, Louis Vuitton 路易威登, Armani 阿玛尼, Gucci 古驰, Versace 范思哲, Prada 普拉达, Zegna 杰尼亚, Valentino 华伦天奴, Burberry 巴宝莉, Adidas 阿迪达斯, Nike 耐克, BMW 宝马, Benz 奔驰, Ferrari 法拉利 Rolex 劳力士, Cartier 卡地亚, IKEA 宜家, etc.

Lorsque les sociétés détentrices de ces marques rédigent des communiqués de presse ou organisent des réunions de présentation de nouveaux produits ou services, elles utilisent l’équivalent en langue chinoise de leur marque, afin qu’il soit plus aisément retenu par les consommateurs chinois, lesquels se souviendront nécessairement davantage du signe chinois que de la marque en caractères latins.

  • Intérêt procédural

Du point de vue de l’examen pratiqué par l’Office des Marques en Chine (Chinese Trade Mark Office), il est fréquent que les examinateurs soulèvent des motifs de refus provisoire fondés sur l’existence de droits antérieurs qui ne sont que vaguement proches de la demande présentée en caractères latins.

Cette difficulté provient du manque de connaissance de la population chinoise, et par voie de conséquence des examinateurs de l’Office local, des règles grammaticales et phonétiques des termes étrangers rédigés en caractères latins.

Cela génère alors des frais en vue de contester la position de l’Office, et de tenter de démontrer que les marques en cause s’écartent suffisamment d’un point de vue visuel, phonétique et intellectuel dans l’esprit du consommateur moyen chinois, ce qui peut s’avérer difficile même pour des signes présentant de nettes différences à nos yeux de consommateurs européens, compte tenu de la connaissance très limitée desdits caractères par la population chinoise.

Ainsi, procéder à un dépôt alternatif (ou complémentaire) en caractères chinois sera de nature à permettre de maximiser les chances d’obtenir l’enregistrement de votre marque, tout en minimisant les risques de refus fondés sur des marques nettement éloignées.

  • Intérêt juridique

Les marques étrangères sont très souvent la cible d’opportunistes et de contrefacteurs en tous genres en Chine, dès qu’elles rencontrent un succès dans leur marché domestique voire à l’international.

Michael Jordan a dû batailler de très nombreuses années à l’encontre de la société QIAODAN SPORTS CO., LTD., avant d’obtenir l’annulation de marques déposées dès 2007, correspondant à la translittération de son nom de famille (d’abord en caractères chinois traditionnels en 2016, puis en caractères pinyin en 2020), enregistrées dans de nombreuses classes de produits et services et ayant acquis une solide réputation auprès des consommateurs chinois dans le domaine des vêtements et accessoires de sport.

  • Comment choisir un signe adapté en caractères chinois ?

Lorsqu’ils souhaitent identifier une marque destinée spécifiquement au marché chinois, les titulaires de droits sont en pratique confrontés à plusieurs problématiques pour choisir le signe qui aura le plus de sens et véhiculera des idées et/ou concepts positifs.

En effet, les titulaires devront par exemple choisir entre une traduction, une translittération, ou une adaptation de leur marque, ou même possiblement une solution hybride, mais également entre le chinois traditionnel et le chinois simplifié ou les caractères pinyin.

De manière générale, quatre grandes méthodes sont retenues pour traduire une marque en caractères chinois :

  1. La première méthode est la translittération. Cette opération consiste à traduire le signe de manière phonétique, syllabe par syllabe. L'avantage de cette méthode est que le propriétaire de la marque peut s'assurer de la cohérence du signe retenu en termes de prononciation. L'inconvénient est que le résultat obtenu peut n'avoir aucune signification en langue chinoise. Par exemple, la marque chinoise correspondante de CADILLAC est « 凯迪拉克 », qui sera prononcée « KAI DI LA KE» en pinyin, et il en va de même concernant les marques ARMANI (阿玛尼 ou «A MA NI»), HILTON ( 希尔顿 ou «XI ER DUN»), BOEING (波音 ou «BO YIN»), SONY  est (索尼 ou «SUO NI») et SIEMENS ( 西门子 ou «XI MEN ZI»).
  1. La deuxième méthode consiste en une traduction littérale / sémantique des termes latins. Contrairement à la traduction phonétique, l'avantage de cette méthode est que le résultat obtenu conservera la même signification en chinois. L’inconvénient notable est que la prononciation en chinois du signe retenu n’a pas de lien avec la marque originelle. Ainsi, la marque APPLE a été traduite « 苹果 » selon cette méthode, et sera prononcée en pinyin « PING GUO », tandis que la marque SHELL (壳牌) sera prononcée « QIAO PAI » et VOLKSWAGEN ( 大众) « DA ZHONG ».
  1. La troisième méthode est une adaptation libérale tenant compte des caractéristiques mises en avant par la marque. Comme évoqué précédemment, la marque chinoise correspondante de BMW est « 宝马 » prononcée «BAO MA», signifiant «cheval précieux». Or, dans la Chine médiévale, le cheval était un important moyen de transport pour les personnes. Les chevaux précieux, lesquels étaient capables de parcourir des milliers de kilomètres en une seule journées, étaient généralement très recherchés, et il existe de nombreux poèmes faisant l'éloge des chevaux précieux à travers l’histoire. Cette adaptation libérale dispose ainsi d’un ancrage traditionnel auprès des consommateurs chinois, et a participé du succès commercial de la marque sur le territoire.
  1. La quatrième méthode est une combinaison des 3 autres méthodes, afin d’obtenir un résultat proche de la marque d’origine du point de vue de la prononciation, et qui en outre véhiculera un sens précis pour les consommateurs chinois. C'est généralement la solution qu’il convient de privilégier afin de s’assurer de disposer d’un équivalent chinois bénéficiant d’un pouvoir d’attraction propre et qui sera de nature à transmettre des valeurs / concepts positifs. A titre d’illustration, la marque  STARBUCKS a été adaptée en « 星巴克 » (prononcée « XING BA KE » en pinyin). Le premier caractère « 星 » est la traduction littérale de « STAR », et les deux derniers « 巴克 » sont la translittération de « BUCK ».

L'exemple le plus représentatif de cette dernière méthode est la marque COCA-COLA, laquelle est commercialisée sur le territoire chinois sous la forme « 可口可乐 », laquelle sera prononcée « KE KOU KE LE » en pinyin, phonétiquement proche de la marque en caractères latins. En outre, chacun des caractères chinois a été choisi méticuleusement, les caractères « 可口 » signifiant « savoureux » ou « délicieux », tandis que les caractères «可乐 » signifient « agréable ». Ainsi, l’association de ces deux notions sera de nature à laisser une idée facilement mémorisable et positive dans l’esprit du consommateur chinois, quand bien même cette expression dans son ensemble n'est pas courante en langue chinoise et n'est donc pas descriptive du produit.

A retenir :  Comme le souligne Nextmarq, le dépôt d’une marque en Chine est une étape à anticiper car elle aura de très grandes répercussions en termes d’image de marque et de développement commercial sur le marché chinois. C’est la raison pour laquelle il convient aux titulaires de droits de s’en occuper de manière proactive, afin de s’emparer de cette problématique et d’être maîtres des valeurs qu’ils souhaitent véhiculer auprès des consommateurs locaux.

Mots-clés :  Marque - Chine

    Décompilation de logiciel : la CJUE confirme le droit à décompiler un logiciel pour corriger des erreurs

  L’arrêt du 6 octobre 2021 de la Cour de Justice de l’Union Européenne, rendu sur question préjudicielle de la Cour d’appel de Bruxelles, intervient dans le cadre d’un litige opposant la société Top System à l’État belge, concernant la décompilation, par le bureau de sélection de l’administration fédérale belge, d’un programme d’ordinateur développé par Top System à la demande de cette administration, et faisant partie d’une application sur laquelle l’administration détient une licence d’utilisation.

 

Cette décompilation visait à désactiver une fonction défaillante de l’application et à corriger certaines erreurs de conception affectant l’application qui rendaient impossible une utilisation de celle-ci d’une manière conforme à sa destination.

1/ La première question de la juridiction de renvoi porte sur la question de savoir si la Directive 91/250 portant sur la protection juridique des programmes d'ordinateur doit être interprétée en ce sens que l’acquéreur légitime d’un programme d’ordinateur est en droit de procéder à la décompilation de tout ou partie de celui-ci afin de corriger des erreurs affectant son fonctionnement, notamment quand la correction consiste à désactiver une fonction qui affecte le bon fonctionnement de l’application.

La Cour y répond positivement.

2/ La seconde question posée à la CJUE par la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’autorisation du titulaire des droits sur le logiciel est nécessaire pour permettre à l’acquéreur de procéder à la décompilation visant à corriger les erreurs affectant le fonctionnement du logiciel.

Là encore, la Cour répond par l’affirmative, précisant néanmoins que l’ « acquéreur n’est en droit de procéder à une telle décompilation que dans la mesure nécessaire à cette correction et dans le respect, le cas échéant, des conditions prévues contractuellement avec le titulaire du droit d’auteur sur ledit programme ».

En effet, la Cour affirme que les parties ne peuvent exclure contractuellement toute possibilité de procéder à une correction de ces erreurs. En revanche, elles sont libres d’organiser contractuellement les modalités d’exercice de cette faculté, et en particulier, convenir que le titulaire doit assurer la maintenance corrective du programme concerné.

A retenir :  Cette décision rappelle l’importance pour le titulaire des droits sur un logiciel d’encadrer contractuellement la possibilité pour le bénéficiaire d’une licence d’apporter des modifications au logiciel, et en particulier d’accéder au code source, de l’étudier et de le modifier afin d’éviter de lui accorder une trop grande marge de manœuvre qui pourrait être préjudiciable.

Mots-clés : Propriété intellectuelle – Logiciel – Décompilation

Source : https://www.legalis.net/actualite/le-droit-a-decompiler-un-logiciel-pour-corriger-des-erreurs-confirme-par-la-cjue/

     Sécurité et RGPD : la CNIL adopte une recommandation concernant la journalisation

 

Par délibération du 14 octobre 2021, faisant suite à une consultation lancée le 28 mai dernier, la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) a adopté une recommandation concernant les mesures de journalisation.

 

Rappelons que d’un point de vue de la sécurité informatique, la journalisation (le fait de tracer les accès aux données et des actions réalisées sur celles-ci) est un outil indispensable pour détecter les incidents et fait partie à ce titre des obligations minimum de sécurité exigées par le RGPD (règlement européen 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel) et la CNIL.

Un exemple très récent en a été donné dans une sanction concernant la RATP et l’accès à sa base de données RH (400.000 euros d’amende par décision du 29 octobre 2021).

La journalisation consiste notamment à collecter des informations comme l’identifiant utilisateur, la date et l’heure de l’accès, l’identifiant de l’équipement utilisé, …

Toutefois, un équilibre est à trouver entre la mise en place d’une telle mesure et le risque corrélatif d’une surveillance et/ou d’une collecte de données excessives qui sont elles aussi sanctionnées par la CNIL et le RGPD.

Il faut bien sûr respecter les obligations issues du RGPD concernant ce traitement de données (respecter les finalités du traitement, informer les personnes, respecter leurs droits, sécuriser les journaux de connexion, limiter leur conservation, mention dans le registre de traitements, contrat avec les sous-traitants éventuels…).

C’est la raison pour laquelle la CNIL a publié une recommandation pour guider les personnes traitant les données sur les mesures à prendre pour respecter cet équilibre :

 

  • Quelles opérations tracer ?

Les opérations de création, consultation, modification et suppression des données à caractère personnel.

  • Quelles données collecter ?

L'auteur individuellement identifié, l'horodatage, la nature de l'opération réalisée ainsi que la référence des données concernées par l'opération. Il faut minimiser l’inclusion de données personnelles dans les données de journalisation.

  • Comment collecter et conserver les « journaux de connexion » ?
  • Cette journalisation peut être intégrée au niveau applicatif ou bien gérée au niveau technique au moyen des ressources logicielles utilisées par l'application.
  • Mettre en œuvre un système de traitement et d'analyse des données collectées et de formaliser un processus permettant de générer des alertes et de les traiter en cas de suspicion de comportement anormal
  • Les données collectées (journaux de connexion) doivent être conservées séparément du système principal et de manière sécurisée (équipements physiquement distincts, autorisations spécifiques d’accès, horodater et signer les journaux dès leur création, règles et procédures formalisées et documentées pour leur utilisation…) 
  • Utilisation uniquement pour la sécurisation du traitement et non pour d’autres finalités (mettre en place une charte d'utilisation définissant les usages acceptables ou levée d'une alerte spécifique en cas d'accès en modification aux données)
  • Durée de conservation maximum recommandée (sauf exception ou justification particulière) : entre six mois et un an et limiter les copies augmentant de fait la durée de conservation

 

A retenir :  Mettre en place un système de journalisation des accès aux données personnelles est indispensable, mais pas n’importe comment !

Mots-clés : Données personnelles – RGPD – Sécurité – CNIL – Journalisation  

Source : Délibération 2021-122 du 14 octobre 2021 portant adoption d’une recommandation relative à la journalisation ; Sécuriser et tracer les accès